Mrs. Mary Sharman de Leeds ne se débarrassa pas aussi aisément du fantôme qui les tourmenta, elle et sa famille, pendant près de douze ans. Leur calvaire, narré en juin 1974 par le Yorkshire Evening Post, commença en 1962 après qu'ils se furent installés dans une nouvelle maison ou Mary Sharman, séparée de son mari, vécut avec ses six jeunes enfants.
Une nuit, elle vit la porte des toilettes ouverte. Un instant après, racont-elle, "une tête apparut à cette porte. Puis une femme âgée sortit des toilettes et se planta devant moi. Elle n'avait qu'un oeil ouvert et elle me souriait d'une façon bizarre. Puis elle agita sa canne à mon nez - une canne blanche."
Le lendemain, Mrs.Sharman parla de ce qu'elle avait vu à des voisins. "C'est la vieille Mrs.Napier", dirent-ils. Cette dame, qui était complétement aveugle, avait vécu dans cette maison avant l'arrivée des Sharman. On l'avait trouvée morte dans les toilettes. Cette première manifestation fut suivie de celles d'un esprit frappeur. La famille constata avec terreur que tout se déplaçait sur les dessus de cheminée, et que les portes s'ouvraient et se fermaient seules. Parfois des bruits de pas s'entendaient dans l'escalier ; parfois, le spectre de Mrs.Napier apparaissait.
" Les matelas des enfants se soulevaient pendant la nuit, et les couvertures étaient jetée en tas sur le plancher", a raconté Mrs. Sharman à L'Evening Post. " Je pensai devenir folle...Les enfants et moi ne dormions plus dans nos chambres, mais tous dans la même pièce que nous barricadions la nuit avec un buffet et des chaises."
Mrs.Sharman, qui était catholique, s'en fut trouver le curé de sa paroisse. Celui-ci fit une cérémonie de "bénédiction" - une sorte d'exorcisme en plus court. Il bénit et aspergea d'eau bénite chaque pièce de la maison. Malgré cela, les troubles continuèrent. C'étaient en général les facéties classiques des esprits frappeurs ; des vêtements jetés dans le hall d'entrée, un rouleau de linoléum trouvé déroulé le matin. Mais un jour il se produisit quelque chose de plus effrayant.
Les enfants dormaient maintenant tous dans une même chambre du premier étage ; ils avaient l'abitude de chanter ensemble avant de s'endormir. Brusquement, par un hasard étrange, la chanson s'arrêta, un soir que Mrs.Sharman avait la visite de ses frères. Ils se précipitèrent dans la chambre ou ils virent Michael, âgé de douze ans, flottant à environ deux mètres en l'air tandis que les autres enfants le regardaient terrifiés. Michael avait les yeux ouverts, mais il était en état de choc. Un frère de Mrs.Sharman le tira vers le bas et tenta mais en vain, de le réconforter.
On appela la police et un ambulance qui amena Michael à l'hôpital. Les policiers restèrent quelque temps en surveillance ; mais l'un d'entre eux partit rapidement, disant ne pas pouvoir supporter l'atmosphère étrange qui régnait là. Michael, après avoir été soigné, revint à la maison le lendemain. Mais sa lévitation semble avoir laissé sur lui une marque indélébile. Depuis ce jour, il est affligé d'un bégaiement. Le médecin de la famille demanda l'intervention de trois personnes faisant des recherches en métapsychisme. Celle-ci passèrent trois nuits dans la maison. Leurs conclusions n'ont pas été publiées ; mais il appert que, à leur avis, le mieux qu'avait à faire la famille était de déménager.
Si l'on considère que les esprits frappeurs sont plus associés aux personnes qu'aux lieux, rien d'étonnant à ce que les ennuis de la famille aient continué ailleurs, avec bruits de pas et matelas enlevés des lits. Quelques temps après apparut un nouveau fantôme, celui de la mère de Mary Sharman qui venait de mourir. Cette apparition ne leur causa pas d'ennuis ; mais les événements qui duraient depuis des années, agissaient sur leurs nerfs. Mrs.Sharman fit venir un autre prêtre qui ne resta que quelques minutes et partit en déclarant : "C'est le mal."
Quel que soit ce "mal", il semble avoir abandonné sa mainmise sur la famille à la suite d'un nouveau déménagement en 1974. Mrs.Sharman, remariée, a déclaré à l'Evening Post qu'il n'y avait pas eu de manisfestations du genre "esprit frappeur" dans sa nouvelle maison. La diversité des phénomènes subis par la famille Sharman ainsi que les façons variées dont on a essayé de les maîtriser illustrent la complexité du problème des fantômes. Si ce cas avait fait l'objet d'une enquête appronfondie, il se peut que plusieurs explications différentes eussent été nécessaires pour rendre compte de ses divers aspects. La famille pensait que l'esprit frappeur était celui de Mrs.Napier, ce qui semble peu plausible à la plupart des spécialistes.
La présence de plusieurs enfants à l'âge de la puberté paraît une cause plus vraisemblable ; à l'appui de cette thèse vient le fait que l'esprit frappeur a suivi la famille dans une autre maison, sans relation avec Mrs.Napier. L'apparition de celle-ci et celle de la grand-mère ont pu être engendrées par la famille elle-même. Pourtant il se peut que le fantôme de Mrs.Napier ait été une réalité objective, car celle-ci fut aussitôt identifiée par les voisins d'après la description de Mary Sharman. La terreur du second prêtre, devant quelque chose qu'il indentifiait comme "le mal", fait penser qu'un être surnaturel se serait attaché à la famille ; mais elle peut également suggérer l'idée que de conflits étouffés au sein de la famille ont engendré une force hostile à laquelle le prêtre a été hypersensible. Il est une autre possibilité, c'est que la réaction du prêtre, entièrement subjective, ait été déclenchée par sa peur.
Lorsqu'il enquête, le chasseur de fantômes doit avoir à l'esprit toutes ces possibilités. S'il est sceptique, il trouvera quantité de faits venant appuyer sa conviction que "tout cela est imaginaire", ou même que les manisfestations des esprits frappeurs sont causées par des tremblements de terre ; mais parfois il tombera sur un cas dans lequel paraîtront jouer d'autres facteurs. De même, l'enquêteur qui a tendance à croire aux esprits trouvera les preuves que parfois certaines personnes créent leurs fantômes ou leurs esprits frappeurs.
Tout phénomène de hantise est complexe. Dans leur ensemble, les diverses manifestations constatées sont un des mystères les plus troublants dont la science ait jamais essayé, sans grands résultats, de trouver la clef.