
Au bout de l'horreur
Le réflexe du lézard
Pierre Bellemare est un conteur né. Sa voix empreinte de mystère, reconnaissable entre mille, a marqué des générations d'auditeurs sur Europe 1 et sur TF1. Mais il est resté quelqu'un de très discret et extrêmement pudique pour qui la relation de confiance est essentielle.
Cet homme de radio et de télévision a commencé très tôt. Dès l'âge de dix-huit ans, il travaille, auprès de son beau-frère Pierre Hiegel, comme assistant à des programmes diffusés sur RTL. Soucieux de maîtriser les aspects techniques, il se consacre ensuite à l'enregistrement et à la prise de son, puis à la mise en ondes.
1954 est une année charnière. Pierre Bellemare et Jacques Antoine, qui deviendra son complice de toujours, créent l'émission « Télé-Match », début d'une grande série de jeux. Le principe : une alliance entre un candidat intellectuel et un sportif pouvant le repêcher.
En parallèle, Pierre Bellemare anime « Vous êtes formidable » sur Europe n°1. Cette émission fait appel à la solidarité des auditeurs qui se mobilisent pour porter secours aux sans-logis – c'est l'époque de l'abbé Pierre, de l'hiver 1954 et de de la catastrophe de Fréjus. À partir de là, rien ne semble plus arrêter Pierre Bellemare. Les émissions vont se succéder, tant à la radio qu'à la télévision, sa carrière d'animateur se doublant d'une carrière de producteur et de créateur de jeux.
Après « La Tête et les Jambes » (en 1960), il lance, en 1964, la première « caméra invisible », présentée par Jacques Rouland, avec qui il formera une équipe à laquelle s'ajouteront Jean-Paul Rouland, Harold Kay et Jean-Marc Epinoux. Puis viennent « Pas une seconde à perdre », « 20 millions cash », « Le Sisco », sans oublier « Le Tricolore », « Pièces à conviction », « Les Paris de TF1 », « La Grande Corbeille »... En dehors des jeux, son talent à multiples facettes s'exerce avec succès dans le journalisme (« 10 millions d'auditeurs » (RTL), « Il y a sûrement quelque chose à faire » (Europe 1) « Vous pouvez compter sur nous » (TF1, Europe 1) et dans les variétés (« Pleins feux » sur TF1 et « Témoins » sur la deuxième chaîne).
Nommé directeur général d'Europe 1, il démissionne de ses fonctions au bout d'un an, préférant rester à une place moins en vue et avec une équipe plus soudée (Mon équipe de travail ressemble un peu à une troupe de théâtre, où l'on se rassemble autour de quelqu'un par osmose, peut-être parce qu'on a de l'admiration pour lui, ce que je crois indispensable, mais surtout parce que, même si l'on diffère sur certains points, on a des goûts communs et une volonté commune d'aller dans certaines directions.).
En 1986, il crée sur TF1 le « Magazine de l'objet » qui deviendra le « Téléshopping », émission qui connaît un véritable succès. Pierre Bellemare devient alors Monsieur Téléachat.
Mais ce qui a le plus marqué les Français, c'est son extraordinaire talent de conteur. Par une lenteur, des répétitions calculées, sa voix a une action quasi hypnotique sur l'auditeur. Lui seul sait, par un mot ou un regard, nous glacer le sang. Lui seul réussit, par un silence éloquant, à ménager ce suspense insoutenable qu'il distillait quotidiennement dans les émissions « C'est arrivé un jour », « Suspens » (TF1), « Les Dossiers extraordinaires », « Les Dossiers d'Interpol », « Histoires vraies » et « Dossiers secrets » (Europe 1).
Cette impression se retrouve à la lecture des fameuses histoires qu'il publie en collaboration avec Jacques Antoine, Jean-Marc Epinoux ou Jean-François Nahmias, et devenu un véritable phénomène d'édition : plus de 80 titres parus pour une vente totale estimée à plus de dix millions d'exemplaires en France .